JEAN CLAIR
LA PART DE L'ANGE
Journal 202ì12 - 2015
Gallimard (14-01-2016) Collection Blanche
La part de l'ange est
la part du fût occupée par l’«esprit» volatil d’une distillation. C’était aussi
la part de l'oreiller laissée vide pour l’ange qui veille sur le sommeil de
l’enfant. C’était, dans les sociétés anciennes, l’offrande aux dieux, les
prémices d’une récolte, pour assurer les moissons futures.
Une société
moderne exclut le don à des puissances invisibles, génies ou divinités. Le prix
y remplace la valeur, y compris pour ce qui est sans prix. Mais c’est se
condamner à la stérilité et au désespoir.
Historien de l’art, auteur
d'expositions mémorables comme «Mélancolie», l’auteur de ce Journal a été
l’observateur du changement : le Musée imaginaire est devenu une salle de
ventes. Il s’en explique, parmi d’autres souvenirs, dans un entretien avec
Malraux demeuré inédit.
Comment un enfant grandi dans le silence du pays
mayennais a-t-il pu finir ses jours sous la Coupole où l’on discute chaque
semaine des mots du Dictionnaire? À l’origine de cette trajectoire, qui le
laisse aujourd’hui désemparé, une double expérience : la psychanalyse, dont il
est très jeune un patient, gardant le silence dont il connaît le prix, puis la
découverte de la peinture qui, mieux que la littérature, garde elle aussi le
silence.
Pour la première fois, Jean Clair donne comme sous-titre à son
texte Journal 2012-2015, comme s’il reconnaissait que ses écrits littéraires
parus chez Gallimard, depuis le Court traité des sensations en 2002, jusqu’au
Dialogue avec les morts en 2011 et aux Derniers jours en 2013, étaient les pans
d’une même œuvre, fascinante à plus d’un titre, qui le met au niveau des grands
diaristes, et dont La part de l’ange est le nouveau volume.