mercoledì 20 gennaio 2016

THOMAS HIRSCHHORN: PIXEL-COLLAGE GALERIE CHANTAL CROUSEL, PARIS




THOMAS HIRSCHHORN
PIXEL-COLLAGE
Galerie Chantal Crousel
10, rue Charlot - Paris
9/1/2016 - 26/2/2016

Pixel-Collage est une nouvelle série de collages. Avec ces oeuvres, je veux intégrer le phénomène grandissant des images ‘sans visage’ reproduites aujourd’hui. Ce qui m’intéresse plus précisément dans cette esthétique du ‘sans visage’ est le fait que la pixellisation en est l’incarnation formelle. Je veux intégrer dans mon travail l’usage grandissant de la pixellisation. Elle est devenue très courante et on utilise de plus en plus les pixels ou le floutage dans les médias. Ce phénomène m’intéresse car on a l’impression que, pour être authentique, une image doit être pixélisée, du moins en partie. La pixellisation ou le floutage ont pris le rôle de l’authenticité. Une image pixélisée est sûrement authentique si elle a des zones inacceptables qui sont masquées. Ce qui est acceptable n’est pas pixélisé. Et il est intéressant d’observer que l’utilisation des pixels ne suit absolument aucune loi commune. Parfois certaines zones d’images sont pixélisées sans logique ni raison, pour montrer qu’à l’évidence quelqu’un s’en occupe, surveille, sait et décide ce qui est acceptable ou ne l’est pas. Des images partiellement pixélisées paraissent bien plus authentiques et sont acceptées en tant que telles par les spectateurs. Il paraît donc clair que les pixels attestent de l’authenticité: l’authenticité imposée par autorité. Et dans notre monde chaotique, incommensurable, contradictoire et complexe, il y a une demande énorme d’autorité. Les pixels apportent une esthétique à cette demande d’autorité. La pixellisation ou le floutage sont justifiés pour “protéger le spectateur”, pour protéger quelque chose dans l’image elle-même, ou pour “protéger” une information censée apparaître dans l’image. Je n’accepte rien de “protecteur” et je pense que personne aujourd’hui ne peut accepter une quelconque autorité de la protection. Utiliser des pixels vient évidemment toujours d’un geste autoritaire. Par conséquent, utiliser des pixels crée la confusion, la frustration et, volontairement ou non, rend les choses plus “hiérarchiques”; bien sûr l’acte de pixéliser n’est pas fondé sur l’émancipation ou sur l’émancipation du spectateur. La pixellisation est plutôt clairement utilisée comme propagande, elle infantilise ou manipule le spectateur. Et pixéliser une partie d’une image peut sous-entendre ou indiquer qu’il y a pire, bien pire, et que quelque chose d’incommensurable est caché ou dissimulé. Un autre élément qui m’intéresse est le fait que paradoxalement, l’utilisation de pixels mène parfois à des images totalement incompréhensibles, les reliant esthétiquement à des formes d’art abstrait. Je suis donc intéressé par les pixels – leur abstraction peut construire une nouvelle forme, ouvrant sur une dynamique et un désir de vérité, la vérité en tant que telle, la vérité qui va au-delà de l’information, de la non-information ou de la contre-information. Il s’agit de comprendre comment une image qui existe peut devenir une abstraction. La vérité ne se manifeste que pour le vrai spectateur, la vérité est une chose visuelle pour celui qui ouvrira les yeux. Je veux utiliser les pixels comme une nouvelle partie de notre réalité existante, chaotique, complexe, cruelle, incommensurable et belle. Bien sûr, je n’utilise pas les pixels pour cacher les choses ou les rendre non visibles. Avec l’ensemble d’oeuvres Pixel-Collage, je veux utiliser les pixels comme outil pour connecter et créer des liens entre les choses. Je veux lier la beauté et la cruauté de la réalité. Les pixels que j’utilise sont faits main – “pixéliser” n’est pas une technique mais un statement artistique. De ce fait, le processus doit être celui du collage, avec l’assemblage visible, car il est important de comprendre que les pixels sont inclus dans mon travail en tant que matériau pour créer des collages, comme les magazines découpés. Les pixels sont un pont visuel entre deux ou plusieurs images de la réalité, entre deux ou plusieurs réalités existantes. Les pixels rendent l’incommensurable visible. Je veux utiliser les pixels comme un instrument pour lier l’indicible avec l’abstrait, la réalité avec le réel, le caché avec le connu. Je veux donner forme à la reconnaissance de la beauté et de l’atrocité car il est important d’insister sur la séparation absolument fausse et cruelle entre ces deux registres. Les Pixel-Collage sont une tentative d’utiliser la clé “Pixel” pour entrer dans une nouvelle image, une nouvelle forme, un nouveau monde.

Thomas Hirschhorn, 2015

Image: Thomas Hirschhorn, Pixel-Collage n°5 (detail), 2015. Courtesy of the artist & Galerie Chantal Crousel, Paris