SERGE LINARÈS
PICASSO ET LES ÉCRIVAINS
Citadelles & Mazenod, 2013
coll. "Textes fondamentaux"
Picasso fut assurément, pour les écrivains du siècle dernier, l’artiste de la plus haute curiosité et persiste à être regardé avec attention par les auteurs récents. Parmi les peintres et les sculpteurs, nul mieux que lui n’est parvenu à causer une fièvre d’écrits aussi étendue dans la communauté, si divisée d’intérêts et d’opinions, des hommes de lettres. Récits et romans, biographies et essais, articles et poèmes, les formes de cette fascination littéraire n’ont cessé de se développer et de varier. Il n’est jusqu’aux planches qui n’aient accueilli les fruits d’une pareille considération à la faveur de partenariats pour des ballets ou des pièces de théâtre.
Ce livre relève un défi, neuf et risqué : proposer une étude globale des rapports de l’artiste avec les écrivains de son époque comme de la nôtre. D’Apollinaire à Bonnefoy, de Max Jacob à Michel Butor, de Rilke à Neruda, de Norman Mailer à Gertrude Stein, une cinquantaine d’auteurs français et étrangers sont envisagés pour la passion, le plus souvent admirative, qu’ils portent à Picasso. Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte pour expliquer le bouillonnement littéraire autour de sa personne et de son œuvre. Et d’abord son réseau de sociabilité, où dominent les artisans du verbe. Aussi le premier chapitre en détermine-t-il l’histoire et les modalités. La floraison de publications en tout genre a toutefois conféré à ce milieu artistique une dimension publique de large portée. C’est le cas de la critique d’art, dont le deuxième chapitre tente de démêler les intentions multiples. La section suivante fait un sort aux proses narratives et aux vers lyriques ayant Picasso pour ferment. Un dernier chapitre met à l’étude les travaux exécutés en collaboration (livres illustrés et spectacles scéniques) qui attestent, de manière éclatante, de la fécondité du dialogue entre l’artiste espagnol et les écrivains contemporains.
En évaluant le poids de ces relations, plus centrales qu’il ne semble de prime abord, c’est à renouveler connaissance avec l’univers de Picasso que le lecteur est invité. Mais c’est aussi à reconsidérer certains enjeux proprement littéraires. A l’heure où la modernité somme chaque art d’expérimenter son autonomie, le face-à-face avec la création visuelle enjoint l’écriture, mise à l’épreuve de l’altérité et soumise à l’aventure de la différence, de préciser ses contours. Il stimule son processus de réflexivité, accentue sa conscience critique. Au surplus, les écrivains se mesureraient-ils à Picasso si son écrasante stature ne les incitait à prendre position dans le champ artistique, et ne leur permettait d’estimer par comparaison l’originalité de leur propre parcours, de jauger leurs capacités personnelles d’évolution ? Au cœur de leur fascination pour Picasso, il y a sa puissance ininterrompue de renouvellement formel qui suscite une forte émulation en un temps où le principe avant-gardiste de nouveauté régit le monde des arts comme celui des lettres.
Cet ouvrage permet d’autant mieux de faire dialoguer écrits littéraires et œuvres plastiques qu’il est illustré de près de 300 reproductions et qu’il présente en gerbe, sur des feuillets encartés, une trentaine de textes d’auteurs étroitement liés à la figure de Picasso.
PICASSO ET LES ÉCRIVAINS
Citadelles & Mazenod, 2013
coll. "Textes fondamentaux"
Picasso fut assurément, pour les écrivains du siècle dernier, l’artiste de la plus haute curiosité et persiste à être regardé avec attention par les auteurs récents. Parmi les peintres et les sculpteurs, nul mieux que lui n’est parvenu à causer une fièvre d’écrits aussi étendue dans la communauté, si divisée d’intérêts et d’opinions, des hommes de lettres. Récits et romans, biographies et essais, articles et poèmes, les formes de cette fascination littéraire n’ont cessé de se développer et de varier. Il n’est jusqu’aux planches qui n’aient accueilli les fruits d’une pareille considération à la faveur de partenariats pour des ballets ou des pièces de théâtre.
Ce livre relève un défi, neuf et risqué : proposer une étude globale des rapports de l’artiste avec les écrivains de son époque comme de la nôtre. D’Apollinaire à Bonnefoy, de Max Jacob à Michel Butor, de Rilke à Neruda, de Norman Mailer à Gertrude Stein, une cinquantaine d’auteurs français et étrangers sont envisagés pour la passion, le plus souvent admirative, qu’ils portent à Picasso. Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte pour expliquer le bouillonnement littéraire autour de sa personne et de son œuvre. Et d’abord son réseau de sociabilité, où dominent les artisans du verbe. Aussi le premier chapitre en détermine-t-il l’histoire et les modalités. La floraison de publications en tout genre a toutefois conféré à ce milieu artistique une dimension publique de large portée. C’est le cas de la critique d’art, dont le deuxième chapitre tente de démêler les intentions multiples. La section suivante fait un sort aux proses narratives et aux vers lyriques ayant Picasso pour ferment. Un dernier chapitre met à l’étude les travaux exécutés en collaboration (livres illustrés et spectacles scéniques) qui attestent, de manière éclatante, de la fécondité du dialogue entre l’artiste espagnol et les écrivains contemporains.
En évaluant le poids de ces relations, plus centrales qu’il ne semble de prime abord, c’est à renouveler connaissance avec l’univers de Picasso que le lecteur est invité. Mais c’est aussi à reconsidérer certains enjeux proprement littéraires. A l’heure où la modernité somme chaque art d’expérimenter son autonomie, le face-à-face avec la création visuelle enjoint l’écriture, mise à l’épreuve de l’altérité et soumise à l’aventure de la différence, de préciser ses contours. Il stimule son processus de réflexivité, accentue sa conscience critique. Au surplus, les écrivains se mesureraient-ils à Picasso si son écrasante stature ne les incitait à prendre position dans le champ artistique, et ne leur permettait d’estimer par comparaison l’originalité de leur propre parcours, de jauger leurs capacités personnelles d’évolution ? Au cœur de leur fascination pour Picasso, il y a sa puissance ininterrompue de renouvellement formel qui suscite une forte émulation en un temps où le principe avant-gardiste de nouveauté régit le monde des arts comme celui des lettres.
Cet ouvrage permet d’autant mieux de faire dialoguer écrits littéraires et œuvres plastiques qu’il est illustré de près de 300 reproductions et qu’il présente en gerbe, sur des feuillets encartés, une trentaine de textes d’auteurs étroitement liés à la figure de Picasso.
Serge Linarès est professeur de littérature française du XXe siècle à l’Université de Versailles-Saint-Quentin et chercheur au Centre d’Histoire Culturelle des Sociétés Contemporaines. Il s’intéresse en particulier aux rapports entre la littérature et les arts (peinture et sculpture). Il a ainsi publié en 2010, aux éditions Citadelles & Mazenod, Écrivains artistes. La tentation plastique (XVIIIe-XXe siècle), ouvrage couronné par le prix Marmottan de l’Académie des Beaux-Arts.